L'affaire Makropoulos

Les origines

Le 10 décembre 1922, à Prague, Janáček assiste à L’Affaire Makropoulos, une pièce de Karel Čapek, son compatriote, jeune écrivain virtuose de « l’inquiétante étrangeté ». Le célèbre compositeur voit dans cette pièce, pourtant peu applaudie, un sujet intéressant et il en achète les droits.

Il opère des coupes et recentre l’action sur le drame de l’héroïne, cantatrice magnifique et adulée, menacée de perdre son immortalité si elle ne retrouve pas la formule du filtre qui la lui a donnée et qu’elle a bu 337 ans auparavant.

Ce qui intéresse avant tout Janáček, c’est de peindre, en une forme courte, la profondeur de l’âme d’un personnage féminin. Il s’attelle à la composition en 1923 et l’achève en décembre 1925. Il écrit : « Ce fut un travail difficile. J’ai été obligé de réécrire trois fois le livret avant de parvenir à ce que je souhaitais. » L’œuvre est présentée le 18 décembre 1926 au théâtre national de Brno.

Un projet d'une vie

Passionné par les figures féminines à qui il a donné la première place dans son itinéraire de metteur en scène d’opéra, Richard Brunel voit en Elina Makropoulos non pas une star glacée, surpuissante, une idole inaccessible mais une femme terriblement seule. Le projet du metteur en scène est de mettre face à face deux cantatrices : Elina Makropoulos dont le chant s’est épanoui au cours des siècles, d’identité en identité, et la jeune Krista qui commence juste sa carrière et doute de son talent.

L’opéra, dans cette mise en scène, montrera l’évolution de cette relation, depuis l’écart vertigineux entre la diva et la débutante jusqu’au consentement de la première à mourir : c’est à travers l’épanouissement de Krista qu’Elina, passant la main, parvient à une éternité véritable