“L’hébergement, un tremplin pour l’autonomie”
13 mars 2023
La Ville de Lyon vient d'adopter son plan d’actions « Lyon, ville hospitalière », qui prévoit notamment un meilleur accueil des personnes migrantes, de faciliter leur participation à la vie sociale, économique et citoyenne et de créer les conditions de leur autonomie. Bel exemple avec Abdoulaye, un Tchadien temporairement hébergé chez Nellie et Baptiste.
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Abdoulaye : J’ai atterri en France en septembre 2020 à l’aéroport de Mulhouse. Puis j’ai voyagé entre Dijon, Paris et Lyon pour des hébergements de courte durée à chaque fois. Se retrouver seul est difficile, mais c’est encore plus dur quand on ne connaît pas la culture : la plupart de mes relations avec des Français se passaient à travers des actes administratifs. C’est pourquoi je me suis rapproché de Singa : sa mission est de faciliter les mélanges entre résidents et personnes migrantes.
Nellie : De notre côté, nous avions l’idée d’ouvrir notre foyer depuis quelque temps : nous avons contacté l’association et, deux mois plus tard, on nous a proposé de rencontrer Abdoulaye. On s’est vus dans un café de la place Voltaire et on s’est tout de suite bien entendus !
Qu’est-ce qui vous a décidé ?
N : L’invasion de l’Ukraine a été le déclic. Dès lors, on a voulu offrir ce qui nous semble être un contexte suffisamment calme et bienveillant pour proposer à quelqu’un de se reconstruire, pendant un an. Notre situation s’y prête : nous avons assez de place dans l’appartement et nos deux fils ont grandi, c’était le bon moment !
A : Quoi qu’il en soit, l’association nous a tous mis à l’aise : si pour une quelconque raison nous souhaitions renoncer, pas d’obligation d’aller plus loin — ni pour eux, ni pour moi.
Baptiste : Nous avions la volonté d’héberger dans un cadre rationnel, pas dans l’émotion pure. Et là-dessus, Singa a su nous rassurer : il y a un suivi régulier, une convention, une charte d’accueil… Personne n’est lâché dans la nature !
La cohabitation, c’est comment ?
A : J’ai ma chambre, mes affaires et je sens que j’ai ma place ici le temps que je trouve mon propre logement. En parallèle, je cherche une formation dans l’informatique et je travaille en intérim à Vénissieux, puisque j’ai obtenu le statut de travailleur migrant. Mon but est simplement d’avoir une vie normale.
B : Abdoulaye n’est pas notre invité, c’est plutôt un colocataire. Il a son espace, sa vie, ses horaires… Donc on est encadrants, bienveillants, disponibles. Mais, par exemple, ce n’est pas notre rôle de résoudre des problèmes sociaux et administratifs.
N : On échange sur la cuisine, les courses, le quotidien… Il y a parfois des malentendus, mais jamais rien de grave et on peut presque tout se dire avec de l’humour ! Abdoulaye est francophone, mais il a grandi très loin d’ici. Souvent, on prend le temps d'expliquer un contexte, un mot, un signe et on réalise que notre société est faite de tas de règles tacites.
A : Le langage et la culture sont tout à fait nouveaux pour moi. Il m’arrive souvent de prendre des notes dans la journée, et une fois rentré j’en parle avec Nellie, Baptiste et les enfants.
Que retenez-vous de l’expérience ?
N : On enrichit notre ouverture d’esprit, on fait un pas de côté par rapport à notre propre condition... Autrement, un Tchadien et une famille française n’auraient presque aucune chance de se rencontrer et de tisser des liens aussi forts.
B : Il faut à tout prix éviter d’imaginer qu’on va avoir un nouveau membre dans sa famille : l’hébergement, c’est avant tout un tremplin pour favoriser l’autonomie. Ça n'empêche pas qu’on a rencontré un ami !
Dispositif J'accueille de l'association Singa
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