Rencontre avec Cart’1, directeur artistique du Festival Peinture Fraîche
Peinture Fraîche, le Festival dédié au Street Art sera de retour du 1er au 31 octobre 2021 pour sa troisième édition. Cette année encore la Halle Debourg accueillera 50 artistes aux esthétiques diverses, du graffiti au post graffiti, de l’artivisme à l’onirisme, de l’hyper réalisme à l’abstraction.
Rencontre avec Cart’1 son directeur artistique.
Pierrick - Cart’1, pouvez-vous nous parler des nouveautés de cette 3e édition ?
L’année dernière on a commencé à s’orienter vers les nouvelles technologies et la réalité augmentée. Cette année 100% des œuvres seront animées en réalité augmentée. Le public souhaitait voir les artistes en train de travailler, sauf que peindre avec des sprays dans un environnement fermé est impossible. La technologie nous aide à régler ce problème grâce aux time-lapses, des vidéos faites avec des photos prises toutes les 3 secondes. On voit alors l’artiste construire sa fresque en accéléré. Les artistes peuvent jouer avec cette prise de vue, laisser des messages au public, jouer avec la caméra. Ça va être intéressant d’aller chercher les messages cachés des artistes, en apprendre plus sur eux et leur façon de peindre.
Deuxième nouveauté : la visite 360° de la halle accessible via internet. La première année on avait reçu beaucoup de visiteurs étrangers, on avait été très surpris de voir des gens du monde entier s’intéresser au festival. A cause de la crise sanitaire, l’année dernière, notre événement a touché un public essentiellement français et régional. On voulait que les œuvres des artistes puissent être vues par le maximum de monde. C’est très important pour nous, on fait un festival pour montrer ce qu’est la création street art dans son ensemble, ce que les artistes ont à dire, les nouveautés.
Quelles sont les grandes tendances de cette nouvelle édition ?
Le festival est un instantané de ce qui se passe sur la scène street-art. On a dégagé quatre grandes thématiques, fruit d’une veille artistique quotidienne. Cette année, j’ai vu beaucoup d’artistes s’engager sur l’écologie, on a donc invité des artistes qui travaillaient sur cette thématique.
Autre tendance : les technologies, de plus en plus d’artistes s’en emparent.
Et l’abstraction, il y a un courant fort du street-art : le graff futuriste, avec des artistes qui s’orientent sur des choses non figuratives, très colorées.
La dernière thématique m’a presque été soufflée. Sur les précédentes éditions, j’ai eu beaucoup de retours disant qu’il n’y avait pas assez d’artistes féminines. Aussi, j’ai voulu inviter des artistes cette année pour questionner le regard féminin dans un milieu très masculin et voir si ces artistes s’emparent de thématiques ou d’iconographies différentes de leurs confrères.
Pouvez-vous nous parler un peu plus de cette dernière thématique. Est-ce que les femmes dans le street art c’est nouveau ?
Au départ, le monde du street art était en très grande majorité un milieu machiste et masculin. Ça a tendance à changer, mais par exemple, cette année on va avoir une quinzaine d’artistes féminines sur 50 artistes. Ce n’est pas une volonté, c’est représentatif de la balance entre les artistes présents sur cette scène.
J’ai une petite fille et je me suis interrogé en tant que père, est-ce que j’aimerais que ma fille se pose la question de si elle est invitée en tant qu’artiste ou parce ce qu’elle est une fille. Pour moi, j’invite des artistes non genrés, ce n’est pas leur genre qui m’intéresse, c’est leur travail d’artiste.
Certaines artistes en ont marre de voir des événements se monter sans femmes, mais n’ont pas envie d’être invitées seulement parce qu’elles sont des femmes. J’ai voulu inviter des artistes pour discuter de ces questions. Quelles sont les solutions ? Est-ce qu’une discrimination, même positive, ne reste pas une discrimination ? Le temps du festival est aussi un moment de réflexion, il y aura donc des podcasts, des tables-rondes avec des artistes sur les différentes thématiques et notamment sur l’univers féminin.
Pouvez-vous nous présenter quelques-unes des artistes présentes cette année ?
Par exemple Floe et Parvati sont deux artistes lyonnaises qui sont en train de monter très haut. Parvati est reconnue sur la scène nationale, elle fait des expositions personnelles à Paris. Elle est très talentueuse et est en train d’émerger avec son univers très particulier.
Floe vit entre Lyon et la Réunion. Son univers questionne justement la féminité, elle représente des femmes bien en chair, très colorées.
Ces deux artistes féminines ont deux univers et des approches du mur extrêmement différents. L’une travaille beaucoup au spray et l’autre plutôt au pinceau, même dans la rue. C’est aussi ça que je trouve intéressant de montrer au public.
Nous avons également annoncé la venue d’une artiste madrilène, Raquel Rodrigo. Elle travaille avec de la laine sur des grilles et fait des canevas qu’elle va poser dans la rue. Ce que j’aime beaucoup c’est le détournement des techniques. Raquel Rodrigo utilise celle de sa mamie pour en faire une activité ultra contemporaine.
En quoi Lyon est une terre de street-art particulière pour vous ?
Lyon est une terre d’art déjà. Pour ce qui est des fresques, la ville était pionnière avec les trompe-l’œil de la Cité de la Création dans les années 80 qui ont fait rayonner Lyon à travers le monde. Le street art a été un milieu très underground avec une scène extrêmement active, créative et connue dans le monde entier. Mais c’est vrai qu’il était très compliqué de s’exprimer, difficile d’avoir accès à des lieux institutionnels. Depuis 2015, j’ai l’impression qu’il y a une explosion du street art à Lyon, il y a plein d’expositions, d’évènements. C’est un peu notre moment !
Quelle place donnez-vous aux enfants dans cette nouvelle édition ?
La même que depuis le départ. Le street art est une culture vraiment transgénérationnelle. On avait envie de faire un évènement qui permette le partage entre les parents et les enfants comme le mur d’expression libre où les gens peuvent s’essayer au spray de peinture. On a mis en place des ateliers d’initiation au street art, à la réalité augmentée. On aura également une grosse zone d’arcade.
Avec le street paper, on dessine des formes avec des feutres posca sur une feuille A3 posée sur l’écran, ensuite, on peut jouer à partir du dessin comme si c’était un flipper avec une balle numérique. C’est un jeu vidéo mais il faut d’abord passer par le dessin.
Une autre des bornes d’arcade a été développée par un street artiste parisien, Zdey. Il est parti de son petit personnage qu’il reproduit sur les murs depuis des années et en a fait un jeu vidéo. C’est une manière de présenter le travail de l’artiste et de pouvoir y jouer.
Les trois autres bornes, avec des jeux un peu rétro, seront customisées par des street artistes. Les jeux seront payants 1 euro la partie, par contre 80% du prix sera reversé à une association d’utilité publique, trois en tout, en partenariat avec l’association lyonnaise Puls Impact.
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